Baie de Somme, 14 au 16 mai
Photos et texte de Thierry... qui n'engagent que lui !
L'ami Marc, organisateur rieur (comme la mouette..) de cette randonnée de 3
jours en Baie de Somme, nous avait fixé rendez-vous au musée de l'Oiseau de
Cayeux le samedi pour midi avec notre casse-croûtes. Le bougre n'avait pas précisé
la suite. Bref, nos voisins français ont rendus leurs musées de plus
en plus attractifs et interactifs avec outre les bestioles empaillées dans les
vitrines, un petit film nous contant l'histoire de la Baie, une démo en salle
s'il vous plait ! (une fine pluie oblige) des exploits de quatre rapaces
impressionnants de par leur dextérité et leur envergure. Claire s'angoissant
de voir Quentin happé comme une vulgaire crevette par l'un de ceux-ci, mais il
n'en fut rien ...en vérité l'arôme du sandwich aux fruits de mer camouflé par
Alain sous son 6e pull eut une effet salutaire et dissuasif. S'en
suivi un petit tour dans la boutique, toujours stratégiquement située à côté
du coin repas, et la petite troupe au complet renforcée de Cécile, une Parisienne
dénichée sur le net par Marc (hum-hum) et qu'il nous avait présentée comme AA
à la morphologie de Kim Clijsters (hum-hum) s'en alla découvrir le gîte très
accueillant et au confort adapté au PMR.
Pour souper, Marc nous emmena au Neptune à Cayeux où un plantureux repas nous
attendait avant les efforts du lendemain ! Sur ce, définitivement acquis à ce
programme, Philippe demanda au chef de continuer sur sa lancée et de se focaliser
sur les spécialités locales (pour peu qu'elles soient aménagées avec des frites !)
La fine pluie de la veille, associée à des prévisions météo fluctuantes,
fut balayée dès dimanche matin par un soleil luxuriant qui n'allait pas nous
priver de ses rayons tout au long de la journée. Voilà qui nous changea de la
Belgique ! Au programme de cette splendide équipée : un périple en
Baie de Somme agrémenté par un guide passionné et passionnant, nous narrant
en long et en large la faune, la flore et l'histoire d'un paysage intimement
lié à l'homme qu'il soit agriculteur, pêcheur ou chasseur. Alors que Claire
faisait la chasse à Quentin, tout heureux de batifoler à gauche et à droite,
le guide nous expliquait le destin tragique de quelques moutons, les uns devenus
trop gras pour se relever avant la marée, les autres à l'instar de Quentin (et
au grand dam de Claire) se perdant dans les multiples sinuosités des bancs...
Et pour le démontrer, à ce moment une brebis, par-delà d'un bras inaccessible
(sables mouvants), implorait notre aide que Thomas et Alain (AA) furent bien
en peine de lui offrir... De son côté, Erika attentive aux explications du guide
quant aux effets aphrodisiaques de certaines herbes (Armoise), s'en bourrait
les poches afin d'en glisser une décoction ce soir dans l'assiette de son compagnon... Quant
aux AA, ils tiraient à qui mieux mieux afin d'éviter l'enlisement fatal... Marie-Françoise
aux cordes tout à l'avant faillit même être rattrapée et passer par-dessous
la joëlette de Céline! A 13 h nous étions de retour à la gare de St Valéry
où un pique-nique préparé par nos hôtes nous attendait... sauf pour la malheureusement
maman de Céline (Marie-Anne) dont le sac à provisions avait mystérieusement
disparu... Nous voici donc contraints de puiser dans nos réserves après ce dur
périple dans les sables mouvants afin d'assurer la subsistance d'une de nos
membres... Alors que les enfants admiraient les aller et venues du train à vapeur,
s'en suivi une sieste d'affamés au bord de l'épuisement. Michel n'avait plus
que la force de soupirer : " Chef, je dors... " quand à 14h,
Marc découvrit le fameux sac, joliment dissimulé sous son pull dans sa voiture...
Changement de décor pour l'après-midi, que nous passons moitié au bord des
falaises, moitié dans une forêt de pins odorants, plus d'un d'entre-nous rêvant
à finir ses jours dans ce coin idyllique. Enivrée par ces pensées et sous le
coup d'un penchant sans limites pour Son compagnon Alain (AA), Erika donna un
beau coup de gîte à sa joëlette qui failli chavirer sans le réflexe salutaire
d'Alain (PMR) qui nous surpris par sa capacité de " pompage " sur
une seule main. Les délices du bois avec au loin le bruit du ressac. Mais c'était
sans connaître Marc (Marin d'eau douce !) la marée étant haute nous allions
crapahuter les joëlettes sur des chemins escarpés - gare au vertige - avec au
menu les nichoirs des mouettes et une jolie démonstration de passage alpin,
où les " gros bras " purent montrer leur capacité aux AP en pamoison... De
retour au bercail, Philippe s'assura les bonnes grâces de l'hôtesse : " Madame,
je vous aime " ! etc... pour le plaisir du ventre et une quadruple
portion de moules/frites, le tout bien arrosé de vin et d'anecdotes savoureuses
du Séjour de l'année précédente où ils n'eurent pour seules compagnes que des
oies en mal d'amour ! ces militaires nostalgiques... Là-dessus, fatigués
et bien repus chacun s'en alla dans son plumard sauf votre serviteur qui profita
de la nuit claire pour observer le premier quartier de lune.
Lundi-matin, départ pour le Marquenterre, une extraordinaire réserve ornithologique connue des naturalistes
du monde entier. Implantée il y a une quinzaine d'années au Nord de la Baie,
cet espace préservé sert de site d'étape pour les oiseaux en migrations vers
le sud de l'Europe et l'Afrique. Il est dévolu aussi aux nichées de cigognes
et de plusieurs espèces de hérons, le tout dans un vacarme continu et sympathique
d'oies et de canards de toutes sortes. Une petite arche de Noé bien accessible
aux pmr et où la proximité et la familiarité de l'avifaune firent le bonheur
de tous.
Cette fois, l'heure du repas venu, tous avaient soigneusement vérifié
l'emplacement de son lunch et tenaient le Chef à l'oeil... Le Chef à qui nous disons
BRAVO et MERCI pour l'excellente pr'paration de ce Séjour.
Terminons enfin le récit de ce week-end palpitant par l'évocation prémonitoire
de Colette qui, au début du siècle, passa 6 années de suite ses vacances en
Baie de Somme.
" Ce doux pays, plat et blond, serait-il moins simple que je
l'ai cru d'abord ? J'y découvre des moeurs bizarres : on s'y promène en chaise,
[�]�trange, pour qui n'a pas grimpé dans une de ces carrioles à large roue,
qui mènent les promeneurs tout le long des vingt-cinq kilomètres de la plage,
à la rencontre de la mer.
[*] le soleil peut se coucher tranquillement au-delà
de la baie de Somme, désert humide et plat où la mer, en se retirant, a laissé
des lacs oblongs, des flaques rondes, des canaux vermeils où baignent les rayons
horizontaux. La dune est mauve, avec une rare chevelure d'herbe bleuâtre, des
oasis de liserons délicats dont le vent déchire, dès leur éclosion, la jupe-parapluie
veinée de roseé.
Les chardons de sable, en tôle azurée, se mêlent à l'arrête-boeuf,
qui pique d'une épine si courte qu'on ne se méfie pas de lui. Flore pauvre et
dure, qui ne se fane guère et brave le vent et la vague salée [*]
Pourtant, ça et là, verdit la criste-marine, grasse, juteuse, acidulée,
chair vive et tendre de ces dunes pâles comme la neige... [*]
La baie de Somme, humide encore, mire sombrement un
ciel égyptien, framboise, turquoise et cendre verte. La mer est partie si loin
qu'elle ne reviendra peut-être plus jamais ? Si, elle reviendra, traîtresse
et furtive comme je la connais ici. On ne pense jamais à elle. On lit sur le
sable, on joue, on dort, face au ciel, jusqu'au moment où une langue froide,
insinuée entre vos orteils, vous arrache un cri nerveux : la mer est là, toute
plate, elle a couvert ses vingt kilomètres de plage avec une vitesse silencieuse
de serpent�[�]
Un oiseau noir jaillit du couchant, flêche
lancée par le soleil qui meurt. Il passe au dessus de ma tête avec un crissement
de soie tendue et se change, contre l'est obscur, en goëland de neige "
Colette,
" En baie de Somme " (légérement remanié),
Les Vrilles de la vigne,
Romans, récits, souvenirs (1900-1919),
Robert Laffont,
Collection " Bouquins ",
I, pp. 673-674.